Dans un premier temps, il ne s’agissait que de parler de la sortie du Blu-ray de Recherche Susan Désespérément. Cependant, deux individus extrêmement passionnés se dissimulent derrière Bubbelpop, dont Rania, une grande fan de Madonna et du support physique !
Et les quelques minutes initialement planifiées se sont rapidement transformées en demi-heures pour finalement se terminer avec plus de 90 minutes de visioconférence. En effet, c’est un peu le risque plaisant de mettre en relation deux passionnés, et ce, d’autant plus qu’ils partagent deux passions : Madonna et le support physique !
Dans le résumé qui suit, vous trouverez plus d’informations sur la sortie de Recherche Susan désespérément, mais aussi de nombreuses informations sur les coulisses de la distribution de supports DVD/Blu-ray, les difficultés à obtenir les droits, le tarif appliqué qui a pu surprendre certains fans, ainsi que les futurs projets de bubbelpop et ce qui les distingue des autres.
Une rencontre passionnante qu’on vous partage ici.
Z : Lorsqu’on évoque une sortie associée à Madonna, on a une certaine crainte en tant que fan, car celles-ci sont rares et souvent peu captivantes. Les rares versions remasterisées des albums en 2021 ou l’absence complète des collectors promis depuis de nombreuses années restent encore en mémoire.
Rania : Nous sommes en contact avec Warner concernant divers projets, ce caractère complexe a toujours contribué à leur réputation. En d’autres termes, ils souhaitent tout gérer. Certains studios ont la possibilité de confier certaines tâches à des tiers, mais Warner refuse cela. Ils s’occupent de tout de A à Z et parfois, ils n’ont pas les bonnes personnes en charge, ce qui les contraint à faire le minimum. Étant donné qu’ils estiment que c’est leur propre direction artistique qui doit être prise en considération, s’il y a des problèmes, c’est souvent de leur responsabilité et non celle des artistes.
Rania : Nous avons eu des échanges avec eux il y a quelques semaines. En réalité, nous avons conclu un accord avec eux afin de diffuser Requiem for a dream en 4K en France. Nous avons également conclu un accord avec la Cinémathèque afin de proposer une semaine de rétrospective en avril du travail de Darren Aronofsky, y compris sa venue. Au départ, nous avons décidé de lancer un magnifique coffret, à savoir le 4K, un livre et, étant donné que la B O. a touché un grand nombre de personnes, une édition vinyle. Et donc nous contactons Warner concernant cela, mais lorsqu’il nous ont proposé le prix du vinyle, nous avons dû abandonner car ils nous vendaient ce dernier à un prix très élevé. Nous avions initialement prévu de vendre 2000 exemplaires, mais en réalité, ils souhaitaient nous vendre le projet au prix grand public. Je ne suis pas d’accord, car je ne le vendrai jamais trois fois le prix demandé par eux. Le public ne l’achètera jamais ! Donc nous avons refusé, car nous ne pouvons pas exister ainsi. Lorsqu’un produit est vendu, il est nécessaire de réaliser un ratio de trois fois le prix acheté au distributeur. Cela s’explique par notre propre marge et celle du revendeur, comme Fnac, etc. C’était donc non viable, donc. On s’est dit : « C’est impossible. ». Un coffret que l’on souhaite vendre à soixante euros devrait finalement être vendu à cent cinquante euros. Non, cela n’est pas possible. Donc nous avons décidé : « Tant pis, il n’y aura pas de vinyle », puis nous avons tenté de discuter avec eux à ce sujet, mais ils ne nous répondent pas, ils s’en fichent vraiment.
Z : Dans cette situation particulière, il est évident que la distribution de supports physiques n’est pas facile. Par conséquent, ma question est : « Qu’est-ce qui peut vous encourager à vous lancer dans cette aventure, d’autant plus qu’il n’y a pas une semaine sans que l’on entende que cela va disparaître? »
Rania : Parce que je suis une collectionneuse, que mon mari est pareil que moi et surtout parce que nous sommes entourés de collectionneurs, etc. Puis aussi parce que nous avons nous-mêmes travaillé pour un éditeur pendant sept ans. On l’accompagnait sur certains produits qui sortaient en collector, que ce soit sur le volet rédactionnel, le packaging, les bonus vidéo, etc. À un moment donné, on s’est dit : « Tiens, ce qu’on fait pour lui ? » Et si on le faisait pour nous-mêmes ? Alors, nous avons élaboré notre plan d’affaires en ce qui concerne cela et nous nous sommes demandés ce que nous voulions proposer. Étant donné que notre profession principale était la communication, nous avions déjà réalisé que, du point de vue du design, nous recherchions quelque chose d’un peu plus sophistiqué et attrayant que ce qui est généralement proposé. Lorsque l’on achète des objets de collection, on ressent toujours qu’il manque quelque chose. Il est possible que le design soit loupé lorsqu’on ouvre un livre, que la sérigraphie ne soit pas correspondante, etc. Cela peut également être le contenu rédactionnel rédigé par des experts qui ne sont finalement pas spécialisés… Et l’idée de proposer ce que propose Wikipedia ne nous intéresse pas. Si nous développons des choses, nous allons réaliser des recherches, des recherches réelles.
Z : Personnellement, l’une des choses que je n’ai toujours pas compris, c’est qu’en 2024, on persiste à offrir du DVD malgré l’existence du Blu-ray et du 4K. Lorsqu’on apprécie le support physique et le cinéma, on aspire au meilleur, mais malheureusement, cette qualité est encore aujourd’hui loin d’être mise en avant
Rania : En effet, nous disposons de statistiques concernant cela. Cinquante-deux pour cent des consommateurs achètent toujours les films en DVD. Ce que les gens ignorent, c’est qu’en ce qui concerne le support physique, il est possible de bénéficier de l’aide du C N C, car sans cela, les prix auraient augmenté davantage. Ainsi, le C N C nous a informés que si nous souhaitons obtenir une subvention, il est nécessaire de mettre en place le support DVD afin de répondre aux statistiques qui indiquent que ce dernier est la principale source de consommation du support physique.
Z : D’accord, mais si l’on suit cette logique, en gardant la VHS, les consommateurs n’auraient pas opté pour l’achat de DVD… N’est-il pas nécessaire de les pousser aux fesses afin qu’ils se tournent vers la HD, et ce, en supprimant le DVD ?
Rania : On n’a rien eu à faire pour la disparition de la VHS, les gens ont simplement opté pour le DVD, ce qu’ils ne font pas pour le Blu-ray. Ensuite, il y a également le marché de l’occasion qui maintient tout cela en vie. Combien de films sont présents dans des bacs de secondes mains alors qu’ils ne sont plus disponibles en magasin ? Quant à moi, il m’arrive également d’aller dans des cash converters, etc. et de trouver une ou deux opportunités. Il est donc important de ne pas abandonner le DVD, car c’est sur ce support (qui aujourd’hui ne coûte presque rien à produire) que nous trouverons le film rare… Le marché de l’occasion continue de croître et de fonctionner pleinement, car les consommateurs ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour dépenser 20 ou 30 euros dans une sortie. Si l’on observe la FNAC, les offres promotionnelles de type 2+1 DVD gratuits suscite plus l’ntérêt du grand public que le collector à 50 euros.
Z : Et serait-il possible d’utiliser les économies réalisées par la non-sortie des DVD pour la production des Blu-ray et 4K?
Rania : Aujourd’hui, la production d’un DVD ne coûte presque rien, donc cela ne suffirait pas. S’il est possible pour la Fnac de proposer des offres de type 3 DVD pour 10 euros, c’est précisément parce que cela n’a pas de coût.
Z : Et concernant les tarifs élevés de certains films, finalement, qu’est-ce qui coute le plus cher dans la fabrication d’une sortie physique ?
Rania : Les droits ! Si je reviens sur le coffret Requiem for a Dream, on avait vraiment envie de proposer quelque chose de fou, mais la maison de disque est trop gourmande concernant les droits sur le vinyle. Si d’autres ne le seront pas. Moi, je serai toujours transparente sur ce sujet-là, et ce, justement parce que je suis d’une génération où la transparence et la vérité n’étaient pas tabou. Aujourd’hui, on a peur de froisser tout le monde… Personnellement, je peux affirmer que notre idée initiale de cette sortie a échoué, car certainement trop ambitieuse. Les détenteurs de droits sont trop gourmands et lorsqu’on nous demande d’acheter le vinyle à plus de 35 euros et que je suis contrainte de calculer un ratio X3 pour faire face à la situation entre mes revenus et ceux des magasins pour la mise en place, cela m’aurait contraint à vendre le coffret à plus de 90 euros. D’un point de vue économique, si on me propose le vinyle à 15 euros, je peux y aller et offrir un collector rentable et faire plaisir aux fans. Cependant, les prix pratiqués sont exagérés et, finalement, c’est le public qui en souffre. Nous avons également pris en compte l’import, où aux États-Unis, on pouvait l’obtenir à 19 euros… Cependant, nous avons reçu le VETO et l’interdiction de le faire venir pour le présenter aux fans par la division française. Un manque à gagner pour la maison de disque
Z : Donc clairement c’est la division française qui veut s’en mettre plein les poches… Surtout en bloquant l’import !
Rania : Oui, c’est exactement ça. Ils sont ceux qui ne veulent pas admettre que le marché a évolué. Ils persistent à travailler de la même façon qu’il y a 20 ans, mais nous sommes arrivés à la fin. Nous arrivons à la fin d’un cycle. Tôt ou tard, ces individus qui restent attachés à leur poste vont abandonner l’affaire. Un travail sur la tarification est déjà en cours pour janvier, car nous souhaitons réduire les prix des coffrets. Nous allons donc rassembler certains efforts, passer par d’autres succursales… Ainsi, nous avons pris la décision de visiter le marché, de ne pas collaborer facilement avec les mêmes structures que tout le monde et de rencontrer un maximum de personnes, de demander des devis et de voir comment nous pourrons réduire les tarifs. Cela nécessite un certain temps, mais au moins il est important de ne pas simplement adhérer à tout ce que l’on souhaite nous imposer.
Z : Si j’ai évoqué le sujet du prix, c’est parce que je trouve que le coffret de Recherche Susan désespérément est quand même coûteux, et surtout parce qu’on peut également trouver le film moins cher en import…
Rania : Je peux expliquer le prix. Initialement, il devait être vendu à cinquante-neuf euros. Lorsque le projet a commencé à être imprimé début octobre, le prix du livre qui accompagnera le film a été modifié et notre imprimeur a augmenté ses coûts. Nous avons été très en colère. Trente-cinq pour cent de plus, c’est incroyable. Dans cette situation, il est nécessaire de revoir le prix, sinon on se casse la figure. Je l’ai vécu très mal et c’est pourquoi, pour nos sorties de janvier, nous avons commencé à faire le tour d’autres entreprises pour faire des devis, car je suis mécontente de la société qui a réalisé notre livre. Je suis très conscient(e) du prix à laquelle il achète et, de plus, il fait des économies en passant par la Chine. Si j’avais voulu offrir du chinois, j’aurais pris le temps de chercher les partenaires moi-même, cela me serait revenu moins cher. En fin de compte, nous avons été confrontés à une structure qui a augmenté ses tarifs afin de ne rien produire, mais simplement faire de l’assemblage ! Nous avons été trompés, et par conséquent, le consommateur en souffre également. C’est la raison pour laquelle, lorsqu’il y a eu cette hausse des prix, je n’avais pas d’autres possibilités que d’augmenter le tarif du coffret. Si ce n’était pas le cas, je n’aurais pas pu le proposer, car j’aurais perdu de l’argent en le sortant. En réalité, je commence à gagner ma vie à partir de cinquante-neuf euros sur ce projet, sinon je suis à zéro. Lorsqu’on constate les bénéfices faibles que nous allons réaliser avec Susanne, heureusement que nous avons un emploi à côté, tels que la production audiovisuelle, les clips, les courts métrages, etc. À un certain moment, je me suis même interrogée, me demandant si je ne trompais pas les fans avec le prix, si je ne faisais pas fausse route. Les fans affirment que c’est trop coûteux, qu’ils n’ont pas les moyens, et je le sais, car en tant que consommatrice, je suis également consciente que parfois cela n’est pas facile, mais j’ai été confrontée à des difficultés et à moins de tout jeter, etc… Ensuite, j’apprécie également, et personnellement, avoir un objet magnifique autour de ce film. Je suis ravi de l’avoir à ma disposition et j’aimerais que d’autres fans puissent également en bénéficier. Mais on s’est fait avoir une fois, pas deux… Les projets à venir coûteront moins cher.
Z : En ce qui concerne les droits… La sortie de In bed with Madonna soulève des interrogations en tant que fan quant à l’origine du vinyle, étant donné que Warner n’a jamais officiellement sorti le Blond Ambition tour.
Rania : C’est le spectacle de Dallas. Un double LP a pu être obtenu. On a déjà passé la commande et nous le recevrons en janvier afin de préparer notre prochaine édition. Nous avons fait l’expérience d’une entreprise anglaise spécialisée dans l’édition de vinyles. Ces personnes ont été rencontrées grâce à la Fnac qui nous a mise en relation avec eux. Leur attitude a été géniale et ils ont même transmis l’audio pour validation, afin de vérifier la qualité de l’enregistrement avant de le presser.
Z : Et là Warner n’a pas mis son veto sur l’import ?
Rania : Non, absolument rien, aucun commentaire ou autre chose à ce sujet, donc tant mieux… C’est passé!
Z : Et la vidéo alors, avez-vous essayé de proposer le concert en bonus ?
Rania : J’ai fait des recherches, mais c’est difficile pour la vidéo. À présent, notre projet est terminé. Est-ce que je dispose du temps nécessaire pour le modifier afin de proposer le concert ? Je suis conscient(e) que les admirateurs en rêvent, mais cela fait des années que Pioneer possède les droits et même Madonna n’arrive pas à les obtenir. Je suis très peu confiante dans l’idée de réussir de mon côté. En tant que fan de Madonna, même simplement pour ma joie personnelle, je serais ravie de pouvoir me le regarder. Puis, je ne souhaite pas offrir des bootlegs en bonus, car si je devais les sortir, ce serait en qualité supérieure, pure.
Z : Et le prix ?
Rania : Il sera a 59 euros.. Promis, on s’est bien entouré cette fois et le tarif est finalisé sur 59.
Z : Niveau contenu ?
Rania : Des entretiens inédits et la sortie du vinyle. Actuellement, je suis en train de vérifier si je peux inclure le dossier de presse de l’époque… Bien que le projet soit en grande partie terminé, on examine jusqu’à la fin si l’on peut encore améliorer le projet. En tant que passionnée, je suis actuellement en train de trouver de nombreuses informations inédites ici et là sur le film et le spectacle.
Z : Concernant vos coffrets, vous vous y prenez combien de temps à l’avance pour bosser dessus ?
Rania : Voilà deux ans que je travaille sur Recherche Susan désespérément. Je me suis lancé en janvier 2023. Rosanna Arquette et la réalisatrice Susan Seidelman ont été contactées et ont toutes deux répondu positivement. Notre voyage en mai 2023 a donc été planifié afin de les interviewer aux États-Unis. Ce coffret contient des interviews originales, pas seulement des copies collées de l’édition britannique. Ensuite, j’ai entamé le design que j’ai élaboré personnellement. La partie rédactionnelle a également été réalisée par moi et nous avons même le privilège d’avoir la préface rédigée par Susan Seidelman. En réalité, le projet devait être publié en octobre de l’année dernière, mais une fois dans mes mains, je n’étais pas pleinement satisfaite du produit finalisé. Étant donné les exigences des fans de Madonna,… J’ai décidé de ne pas faire quelque chose qui ne nous ferait pas plaisir, donc j’ai décidé de reporter le projet à cette année afin de proposer de nouvelles choses et de l’inédit. Pour le livre, etc., j’ai également sollicité une relecture des traductions pour que tout soit impeccable.
Rania : Et en plus, je peux vous le faire savoir en exclusivité… Susan Seidelman a été invitée à la Cinémathèque de Paris pour mars 2025 pour présenter le film ! Nous remercions vivement la cinémathèque qui nous a contacté pour nous demander de présenter le film, organiser une vente sur place et surtout… organiser une dédicace !
Z : En effet c’est juste incroyable et les fans vont être aux anges !
Rania : Je crois également. Je tiens à vous informer d’un autre petit scoop, car je n’ai pas encore communiqué dessus, mais le poster inclus dans l’édition du film est une nouvelle version inédite de l’affiche dessinée par un artiste de renom. Ce sera également une belle chose à dédicacer.
Z : Et en tant que fan de Madonna cela fait quoi de rencontrer Rosanna Arquette et la réalisatrice Susan Seidelman, car j’imagine que vous n’avez pas rencontré la reine ?
Rania : J’aurai aimé mais cela ne s’est pas fait. On a contacté son manager et pas une seule réponse….
Z : Et Susan Seidelman, elle réagit comment vis-à-vis du film après toutes ces années… ?
Rania : Pour Susan Seidelman, c’est son film, son bébé, donc elle en parle plus, est très avenante. Elle a un regard tendre sur ce dernier. À l’inverse, il y avait un seul sujet tabou : Sex and the City, car les fans oublient que c’était elle derrière la première saison de la série culte avant d’être « remerciée ».
Z: Tabou ?
Rania : Elle n’a pas réellement refusé, mais j’ai ressenti qu’elle se fermait légèrement lorsque je mentionnais Sarah Jessica Parker, cherchant à éviter le sujet, etc. tandis que lorsque je mentionnais Madonna, c’était une pluie de compliments et de bons souvenirs. Elle était illuminée.
Z : Et Rosanna Arquette ?
A : Elle est plus détachée. C’est un projet comme un autre pour elle. Elle l’aime, mais c’est un film dans une filmographie, ce n’est pas aussi intense que lorsque l’on est réalisatrice.
Z: Et après Susan et in Bed… Un autre projet autour de Madonna ?
Rania : Pas pour le moment. Body of Evidence nous a été suggéré, mais je suis consciente que cela ne sera pas vraiment populaire. Cela aura un impact limité, c’est pourquoi j’ai décliné ce projet.
Z : Dommage !
Rania : Je savais d’avance que ni Julianne Moore, ni Willem Dafoe n’auraient répondu à nos demandes, et donc proposer une édition vide pour simplement proposer une édition ne nous intéressait pas !
Z : Je comprends.
Rania. Une des petites déceptions, par exemple en ce qui concerne In Bed with Madonna, est que nous avons contacté Netflix afin de leur suggérer d’inclure le documentaire « Strike a pose » sur les danseurs de la tournée qui a été publié sur leur plateforme en tant que bundle ou bonus, mais ils ont refusé. Cela a cependant un effet bénéfique, car ce refus nous a poussés à chercher autre chose et ainsi est née la possibilité du vinyle…
Z : Revenons un peu à la profession de distributeur, car si nous nous concentrons uniquement sur Madonna, nous allons passer la soirée ensemble! En tant que nouvel acteur, à partir de quel nombre d’exemplaires est-il possible de déterminer si nous sommes rentables et économiquement viables?
Rania : Sur Susan Nous allons distribuer 1500 exemplaires et nous avons clairement envie qu’ils partent tous. Je n’ai pas encore pris la décision entre 1500 ou 2000 exemplaires pour In Bed. Je me demande si je devrais le faire en « numéroté et limité », car je suis consciente que je ne le sortirai pas à nouveau par la suite. Cela sera une sortie spéciale. Je me suis également interrogée sur la possibilité de proposer des petites éditions moins collector et moins chères ultérieurement. Il n’y a pas de certitude, car ce n’est pas notre but prermier. Nous avons un contact qui serait intéressé pour publier ces petites éditions en collaboration avec nous, mais rien n’est encore finalisé!
Z: Et Requiem ?
Rania : Dans le cas de Requiem for a dream, c’est normalement prévu. Avant cela, nous aurons notre magnifique édition comprenant un livre sur Darren Aronofsky écrit par un journaliste de renom qui travaille pour « le monde » !
Z : Une question légèrement délicate… Dans certaines boutiques, le piratage est proposé de manière assez simple et cela ne semble étonner personne. Pourtant, les propriétaires des droits semblent assez stricts et à l’affut.
Rania : En réalité, il existe un truc… Dans certaines enseignes, il vous suffit de les qualifier d’occasion (et de gagner moins que si c’est qualifié de neuf) ou de jouer la carte de « l’import » et cela fonctionne. Un ami disquaire ne joue pas ce jeu et il est souvent contacté par les maisons de disques qui surveillent, etc. Certains qui profitent des deux astuces sont en revanche paisibles…
Z : C’est un concept….
Rania : Oui, mais il n’est pas question pour nous de proposer du piratage ou de faire les choses de cette manière. En Espagne, en revanche, ils apprécient énormément cela. La tentation de jouer avec eux est grande et aussi de nous demander si je venais à trouver une version piratée du Blond ambition tour dans ce pays-là et que je la proposerais ensuite en France sur nos éditions… Cependant, j’ai énormément de crainte que Madonna vienne me casser la figure
Z : Il est également possible de comprendre le contrôle des maisons de disques et des éditeurs, car cela prévient également tout abus vis-vis des artistes, non ?
Rania : Cependant, ils sont également dans l’abus inverse en ce qui concerne certains droits! Ce qui explique pourquoi cela est presque courant de proposer du piratage dans certains pays!
Z: Concernant votre grosse sortie… Stay Hungry. C’est un peu surprenant de voir ce film être votre première incursion dans le milieu, car ce n’est pas non plus LE FILM le plus attendu !
Rania : Dans un premier temps, Susan devait être notre première sortie, notre vitrine/présentation, mais les difficultés rencontrées et ma non-satisfaction lors du premier jet ont entraîné un décalage et nous ne voulions pas par la même occasion décaler Stay Hungry. En outre, il est important de ne pas émerveiller nos acheteurs avec une édition incroyable, puis de proposer la suivante, moins fournie, et finalement, de les entendre dire qu’ils sont déçus et que l’éditeur abandonne déjà l’affaire. En fin de compte, cette chronologie nous permet finalement de progresser qualitativement avec une magnifique édition de Stay Hungry, puis avec Susan qui explose tout !
Z : Effectivement
Rania : Encore une fois pour être dans la transparence… Les droits sont accordés pour une durée maximale de 5 ans, donc il est essentiel de ne pas les repousser en permanence sous peine de les perdre et de devoir abandonner tout le travail accompli. La Vie, l’amour, les vaches devait également sortir en début d’année, mais nous avons été très occupés, notamment avec l’achat de 8 films sur une période de 6 mois, ce qui nous a empêchés de nous concentrer sur ce projet. Il a donc été reporté à un autre moment, au plus tard l’année prochaine, car il y a un risque de perdre les droits. Il est donc essentiel de se focaliser sur ce projet afin de créer du beau sans subir de pression.
Z : Comment on sélectionne les films ?
Rania : Sur Catalogue. Les distributeurs disposent de listes de films auxquels ils ne sont pas très confiants sur le plan économique, et nous avons la possibilité de piocher parmi ceux-ci, d’acheter les droits et d’y croire finalement un peu plus qu’eux. Évidemment, chez MGM, il n’est pas prévu d’y trouver les James Bond ou autres films de grande envergure, puisque, dans ce cas présent, ils ont l’habitude de les garder pour eux et de faire leurs propres sorties.
Z : On va frapper à leur porte… ?
Rania : Non, c’est un environnement où il y a des amis, des liens… Il est fréquent de se faire introduire par quelqu’un. Rimini Edition, avec qui nous collaborons, a été très aimable de nous mettre en contact avec les personnes appropriées. Il est à noter que le réseau des distributeurs indépendants est réellement remarquable. Les individus sont aimables, ouverts et se soutiennent mutuellement. Certes, il y a quelques irréductibles qui cherchent à se jouer rebelles moins cools, mais en général, ils sont vraiment agréables. Toutes ces relations solides sont à l’origine de projets de qualité. Après cette étape, nous travaillons sur le projet et nous devons également passer en commission avec des questions précises, etc., dans l’espoir de bénéficier également de l’assistance du CNC. Il est difficile de débuter en mode « Je vais sortir un film » et d’espérer y arriver facilement. Cela nécessite de nombreuses étapes.
Z: Un vrai travail.
Rania : Chacun a sa manière d’agir. Prenons l’exemple de MGM chez qui nous demandons nous-mêmes à voir le catalogue, tandis que Paramount a un contact qui cherche de son côté les éditeurs. Chez eux, ils ont regroupé le travail grâce à une personne chargée de prendre contact avec les éditeurs. Il propose directement les droits aux éditeurs et ensuite les met aux enchères. À date, nous avons pris position sur quatre films et nous espérons que d’autres éditeurs ne négocient pas davantage avec lui. Autre exemple, j’ai également souhaité acquérir les droits pour une sortie en salle d’un film, mais notre partenaire chargé de cette affaire ne croit pas au potentiel de cette sortie et a donc refusé. En revanche, Requiem sera bien proposé en salle. Concernant Susan, on a été sollicité par la Cinémathèque pour savoir si nous souhaitions aller au-delà de la soirée unique. Cette fois-ci, nous avons décliné, car nous n’imaginons pas faire plus de 5000 entrées, ce qui ne serait pas rentable.
Z : En ce qui concerne les sorties de DVD, je suis souvent déçu de constater que nous avons tendance à voir arriver constamment la même chose, sans prise de risques, comme Warner avec ses 80 éditions de Potter ou ESC qui sort le normal, le collector et le steelbook 6 mois plus tard… Aux États-Unis et donc accessibles pour nous en import, on peut dénicher des trésors que l’on ne peut même pas imaginer ici. Par exemple, je ne vois pas la saga Halloween dans son intégralité arriver en 4K en France alors que j’ai déjà celle-ci complète en import des États-Unis à la maison.
Rania : Vous avez mentionné l’un des gros freins de l’industrie. Je ne comprends pas comment ESC a réussi à s’emparer de tout le monde, mais ils possèdent de nombreux catalogues et donc… empêchent également les autres d’essayer des choses. Nous avions l’intention de publier un magnifique coffret Conan le Barbare, car nous avions des liens avec le réalisateur John Milius et l’espoir de réaliser une sortie exceptionnelle autour de ce projet. Cependant, nous avons été confrontés à un mur, car ce film fait partie des catalogues détenus par ESC.
Z : Par exemple, Vendredi 13 chapitre 2 a récemment été publié en 4K et c’est exactement identique à la version proposée dans d’autres pays. Un copié/collé basique, mais vendu à un prix plus élevé, car made in France. C’est vraiment triste ! Ils vendent du rêve avec leurs sorties, etc., et on s’attend à ce que le fan de support soit heureux, dépensent l’argent en France et expriment de la gratitude. En réalité, non Je n’ai plus envie et j’ai toujours une préférence pour l’import avec une véritable approche créative, comme celle proposée par les Scream Factory, Kino Lorber, etc.
Rania : C’est complex.
Z : C’est la raison pour laquelle j’ai acheté Recherche Susan désespérément en import UK avant même votre sortie par ici, car je craignais la même sensation…
Rania : C’est pourquoi nous évoquons nos projets et nos aspirations, afin de démontrer que nous aurons beaucoup de choses inédites et que chaque projet est élaboré depuis le début jusqu’à la fin avec soin.
Z : Et cette rencontre me donne l’occasion de le constater et surtout de développer une confiance vis-à-vis de votre travail. En effet, je vais également acheter l’édition française, même si le prix est élevé, car cette conversation me confirme le véritable travail réalisé par Bubbel Pop.
Rania : Je vous remercie. Je confirme que nous ne sommes pas là pour sortir coûte que coûte n’importe quoi, mais plutôt pour proposer quelque chose en plus. Le souci réside dans le fait que les grandes entreprises submergent le marché avec des produits « faciles », et il est compliqué pour nous de survivre et de nous faire connaître dans ce monde. Ensuite, quand on est une grosse boite qui a quasi « tous les droits », il est nécessaire de rentabiliser et de générer de l’argent rapidement, ce qui entraîne souvent une sortie rapide encore et encore sans efforts afin de renflouer rapidement les caisses. Certains films mériteraient bien plus qu’une simple édition à 30 euros !
Z : C’est triste en fait.
Rania : Particulièrement quand on sait que les acheteurs sont des passionnés et qu’il est nécessaire de proposer des choses qui les touchent. Ils ont bien compris cela ailleurs et les éditeurs mentionnés précédemment jouent sur cela. Parfois, le prix est plus élevé, mais ils offrent des articles rares et soigneusement confectionnés. Et cela a un impact sur les ventes et la réputation.
Z : En ce qui concerne nos inquiétudes en tant que consommateurs, nous nous demandons si Bubbel Pop ne fera pas la même chose… C’est plein de promesses au début, puis on ouvre les vannes pour faire du facile…
Rania : Nous avons pour but de ne sortir que 6 films par an. Aucun excès, pas de surpeuplement du marché, mais plutôt de proposer des produits travaillés et complets ; Encore une fois, le report de Susan a été motivé par cette volonté de faire les choses correctement. Nous sommes également des passionnés et des amoureux du support physique, pas seulement là pour faire du facile.
Z : Se limiter à un nombre de sortie montre en effet vos ambitions créatrice et cela rassure.
Rania : Chez nous, nous sommes constamment à la recherche de quelque chose en plus : livre, vinyle, sortie en salle… Notre approche est avant tout une approche de passionnés.
Z : Cela est agréable de discuter avec une personne franche et sincère sur le domaine professionnel, donc une dernière question… Est-il possible de qualifier Stay Hungry de succès?
Rania : Nous avons été prévenus que novembre était un mois difficile pour la vente de nouveautés. Pendant les fêtes de fin d’année et le Black Friday, les éditeurs publient des coffrets, des rééditions, etc. Le consommateur joue le jeu et se dirige vers des du « connu » afin de ne pas se tromper sur les cadeaux, par exemple. Nous, c’est de l’inédit à petite échelle, mais nous percevons une hausse significative. Les ventes de ce film augmentent légèrement chaque semaine. Le mois de décembre devrait être crucial pour ce projet. Il sera possible alors de parler du succès ou non pour Stay Hungry. Pour le moment, les signes sont favorables. Les demandes de réapprovisionnement sont présentes partout et la Fnac a déjà vendu la moitié de ce qui avait été mis en place par nous. Il y a également de nombreuses précommandes sur Susan, ce qui préfigure une magnifique fin d’année. La semaine prochaine, nous recevrons les éditions de Susan et nous allons réaliser quelque chose d’unique… Nous allons nous rendre en camionnette dans divers magasins afin d’apporter le film et de respecter les délais de livraison. Nous ne souhaitons pas patienter pendant 4 jours pour que La Poste se réveille!
Z : Je suis conscient que j’ai posé une dernière question… Mais… Il y a quelques années, je suis allé au rayon Fnac et un distributeur s’est disputé avec un responsable en raison de leur hausse excessive des commissions de mise en place. Outre l’organisation de ce cinéma en public qui n’est pas très populaire, cet éditeur a cessé de proposer ces films chez eux…
Rania : Je vois de qui vous parlez.. Il est important de noter que la Fnac, tout comme les autres, bénéficie des mêmes avantages et exige les mêmes conditions que les autres. Cependant, cet éditeur utilisait un contact qui augmentait les marges, ce qui a entraîné un conflit d’intérêt. Par exemple, si nous allons proposer une édition à la Fnac pour un prix de 23 euros, alors que la fabrication me coûte déjà 10 euros et bien La Fnac y ajoute 32 %, ce qui nous amène au prix mentionné d’environ 29,99 €. Il n’y a pas de honte ou quoi que ce soit, c’est tout à fait normal et c’est ce qu’ils font tous. Si l’on parle de Recherche Susan désespérément, le prix indiqué était de 69,99 euros, tandis que sur leur site, il est indiqué à 72 euros. Cela s’explique par leur anticipation des frais d’envoi qu’ils vont prendre en charge pour les commandes. Parce que lorsque vous ne réglez pas les frais de livraison, les entreprises telles que la Fnac sont obligées de payer, ce qui explique également cette prise en charge. Il est important de noter que nous avions une librairie qui souhaitait commercialiser nos films et réclamait une commission beaucoup plus élevée que la Fnac. On a refusé, car le consommateur ne dispose pas de ces informations et va simplement croire que le distributeur s’engraisse sur leur dos, ce qui est incorrect. En ce qui concerne Amazon, le plus difficile avec eux est de créer un compte professionnel. Il est nécessaire de suivre des procédures longues et complexes, ce qui explique que nous n’avons toujours rien chez eux. Il faudra que je me penche sur cela.
Z : En tout cas, on ressent une grande passion chez vous et c’est également ce qui nous pousse à fréquenter des magasins tels que Metaluna à Paris, où la passion est plus importante que le simple commerce.
Rania : On ne peut pas tricher et oui Metaluna est un excellent partenaire.
Z : Merci pour cette rencontre passionnante.
Rania: Merci pour cet échange.
Bonus : Unboxing du coffret Recherche Susan désespérément
Soyez le premier à commenter