Twitter : #JazzSinger @warnerbrosfr
Titre original: The Jazz singer
Acteurs : Warner Oland, Al Jolson, May McAvoy
Réalisateur : Alan Crosland
Date de sortie : 1927 (1h36min)
Véritable pionner du cinéma puisque le premier film comprenant des dialogues parlé synchronisés à l’image est proposé cette année au Champs-Elysées film festival et ce fut donc l’occasion pour moi de découvrir finalement ce qui est une partie de l’histoire du cinéma.
Vu par beaucoup comme le fer de lance des « Talkies », soit les films parlants, Le chanteur de Jazz ne comprend finalement pas tant que cela de dialogues (281 mots), un peu comme quand certains réalisateurs actuels filment en Imax, c’est uniquement une partie du film qui en bénéficie. sur 1H36 de film c’est ainsi une poignée de scènes à peine qui comprend du son et des dialogues, le reste étant muet avec les encarts de textes incorporés. Un début prometteur donc pour le cinéma parlant qui en plus donc d’incorporer des dialogues propose surtout des moments « chantés », chose qui jusque là était évidemment absent du cinéma.
Mais au delà de la prouesse technique de l’époque, Le chanteur de Jazz est avant tout un très beau film sur la déchirure entre un père, chantre d’une synagogue, et son fils qui rêve de devenir chanteur populaire. On va ainsi suivre l’évolution de cet enfant chassé de chez lui, parti à la conquête du monde et revenir sous un autre nom, une autre identité en véritable vedette.
Le film traite ainsi souvent de choix difficiles, choix de carrière, choix du coeur, choix d’appartenance aussi à une communauté et un mode de vie bien défini dès le départ ou à un mode de vie que l’on ressent en soi.
Vous l’aurez compris, Le chanteur de Jazz comprend un message bien actuel et ce pourtant déjà présenté en 1927 sous un autre angle, celui de la musique.
Mais Jazz singer (son titre original) a aussi droit aujourd’hui à un regard négatif de par deux scènes où notre héros se maquille en personnage noir afin de monter sur scène. Vu par certains comme raciste, il faut bien entendu remettre ce film dans son contexte et rappeler qu’en 1927, monter sur scène en « Blackface » était quelque chose d’amusant. Mais surtout dans ce film, on ne peut clairement pas parler de racisme car ces deux passages ne sont jamais moqueurs ou proposés en tant que caricature de la communauté black bien au contraire puisque l’une des deux scènes est la plus jolie du film, celle où notre héros chante dans la retenue, une chanson pour sa mère.
Si aujourd’hui on comparerait ce film avec l’époque actuelle, ce serait comme voir un homme se travestir en femme pour marquer la double personnalité, la dualité du héros. Ainsi on peut penser au film « Ma nouvelle amie » avec un homme qui se travestit en femme car il est bien ainsi et comme pour The jazz singer, ce n’est jamais moqueur ou péjoratif pour la femme ou ici la personne noire de peau, au contraire, c’est une déclaration d’amour à l’autre. Ici notre jeune chanteur qui rêve de devenir une vedette de Jazz et donc de se rapprocher des origines de celui ci, à savoir la population noire américaine.
Autant dire qu’il faut un peu se renseigner et situer le contexte pour comprendre les intentions du film sans quoi cela peut être très mal perçu. J’en ai fait l’expérience sur Twitter pendant la vision du film en publiant uniquement les captures d’écran suivantes et automatiquement j’ai eu un retour comme quoi c’était honteux et raciste alors même que la personne n’était pas allé voir plus loin.
Bien entendu il s’agit là d’une réaction normale car vue récemment avec le scandale (de pacotille) lié au film de Ridley Scott « Exodus » où les personnages noirs avaient été remplacés par des acteurs blancs. Mais si dans le dernier film du réalisateur d’Alien, cela n’était réalisé que dans un souci marketing (un film de blanc se vend tristement mieux), cela est totalement différent dans Le chanteur de Jazz où notre acteur blanc ne joue pas le rôle d’un noir mais justement rend hommage à ces derniers en voulant être parmi eux le temps de deux prestations de Jazz.
Une fois ce débat passé, on peut dire que le film a forcément des défauts avec des acteurs qui parfois en font des tonnes même s’il s’agit là du cinéma de l’époque qui voulait ça et que l’histoire emprunte quelques raccourcis rapides parfois, mais néanmoins il est agréable à regarder, l’actrice interprétant la mère est assez juste et touchante et surtout les chansons et la musique d’accompagnement sont de manière générale assez agréable ce qui permet de passer un moment sympathique.
Le chanteur de Jazz n’est donc pas un film accessible à tous (certains détestent les films muets) mais se doit d’être vu pour situer une époque et assister d’une certaine manière à la naissance du cinéma « parlé ».
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